Watchmen


En 1986, DC Comics commence la publication, aux États-Unis, de la série Watchmen d'Alan Moore et Dave Gibbons. En 2005, le très sérieux magazine Time classera cette œuvre parmi les 100 meilleurs récits parus en langue anglaise depuis 1925. Entre-temps, les "Gardiens" vont durablement imprimer leur marque sur tout un genre.


Watchmen : Une Œuvre Culte

L'histoire
Watchmen est une uchronie. C'est-à-dire que le récit se base sur des faits historiques réels, mais explore ce qui aurait pu se passer si leurs conclusions avaient été différentes (par exemple, dans Watchmen, les États-Unis gagnent la guerre du VietNam, ou encore le scandale du Watergate n'éclate pas et Nixon reste président).
Tout commence par l'apparition de réels super-héros, influencés par la littérature populaire (les "pulps"), vers la fin des années 30. Ceux-ci combattent la criminalité et rendent désuets les justiciers des comics. La population prend néanmoins peur et, sous la pression de la rue, le gouvernement fait passer une loi (le "Keene act") pour interdire toute intervention des super-héros (du coup, on peut presque faire un parallèle avec le Superhuman Registration Act au cœur de la saga Civil War de Marvel). Suite à cette loi, il ne reste que deux héros en activité : le Dr Manhattan (le seul à avoir de réels super-pouvoirs) et le Comédien, un agent effectuant les sales besognes du gouvernement. Ce dernier, le Comédien donc, alias Edward Blake, est assassiné. L'un de ses anciens collègues (du temps ou les héros étaient "légaux"), Rorschach, va enquêter sur sa mort. Le tout sur fond de guerre froide et de tension internationale extrême.

Les personnages
Les personnages sont l'un des points forts de Watchmen. [1] Dire qu'ils sont originaux et travaillés, non manichéens et particulièrement humains, donne déjà une idée de la profondeur que Moore a su leur insuffler. Les références sont multiples, Rorschach à lui seul pourrait faire l'objet de plusieurs pages d'analyse (nous nous attarderons sur lui plus loin). Son costume est évidemment lié au vrai Rorschach, "l'inventeur" des petites taches censées nous évoquer des idées spécifiques que les psychologues interprètent ensuite. Il ne viendrait pas à l'idée de tous de baser un super-héros sur ce test pourtant si connu !
Outre leur originalité, les protagonistes en imposent par leurs détresses, leurs failles, leur côté "humain" plus que "super". Le Hibou notamment, quelque peu ridicule, est assez touchant, tout vieillissant et bedonnant qu'il est. Le Dr Manhattan, lui, est hallucinant de détachement et de cruauté involontaire, plus l'égal d'un Dieu qu'un humain, il incarne à merveille la principale faille de la perfection : son inhumanité. Chaque trait de caractère, chaque détail, est ciselé, parfaitement en place, nous révélant peu à peu la véritable nature des Masques. Parfois, Moore nous pousse même bien plus loin. Le Dr Manhattan voyant tout, ce qui s'est passé, ce qui se passe et ce qui se passera, il est extrêmement difficile pour lui d'avoir une relation "normale" avec autrui.
Imaginez un peu...
Vous vous disputez avec votre femme. Mais, en même temps, vous la rencontrez. Et dans le même instant, vous l'embrassez pour la première fois. Pire, toujours en même temps, vous la quittez, 20 ans plus tard. Ces évènements, parfaitement détachés dans le temps pour l'humain lambda, sont pour vous totalement indissociables et égaux en intensité. Vous souriez à jamais pour la première fois et votre première larme de gamin n'en finit pas de toucher le sol tandis que, déjà, des rides inondent votre visage de vieillard. Prenez deux secondes pour imaginer ce qu'une telle perception de la réalité peut engendrer comme psychisme...
Vertigineux.

Les thèmes
Ils sont si nombreux qu'il est difficile d'en faire une liste exhaustive. Tout dans cette œuvre (ou presque) est symbole et fait sens (ne la lire qu'une seule fois serait s'assurer de passer à côté de nombreux éléments importants).
Watchmen est profondément politique de par la réflexion que l'œuvre impose : Qu'est-ce qu'un surhomme ? Comment adapter la loi à d'éventuels pouvoirs dépassant l'homme ? Mais Watchmen est aussi une œuvre intimiste et subtile, prenant parfois le lecteur à contre-pied. Elle incite ainsi à se poser des questions sur les dégâts que cause le temps qui passe, sur le regard que les autres nous portent ou encore sur la folie, le doute, la peur, les choix... tout cela est si habile que c'en est presque sans fin.
Non seulement l'ensemble respire l'intelligence mais, en plus, ce n'est jamais réellement démonstratif ou trop appuyé, tout passe en douceur dans une forme soignée qui caresse le lecteur dans le seul sens valable, celui qui consiste à ne jamais ennuyer pour pouvoir, par l'habileté du récit, faire passer la richesse du fond.

L'aspect graphique
Si quelque chose peut éventuellement rebuter certains lecteurs dans Watchmen, ce sont peut-être les dessins et la colorisation (qui datent tout de même du milieu des années 80). Nous ne sommes donc pas, visuellement, dans les "normes" actuelles. Pourtant, à moins d'être vraiment allergique, l'aspect esthétique n'en est pas désagréable pour autant. Mieux encore, Moore et Dave Gibbons ont poussé la perfection jusque dans l'ordonnancement des cases et dans la forme des dessins : l'épisode 5 est ainsi une sorte de palindrome graphique, la première et la dernière page étant symétriques dans le cadrage et les thèmes.
Mais surtout, certains personnages de Gibbons ont un impact visuel indéniable. Le Comédien et son air suffisant, la glaciale froideur du Dr Manhattan, tout est efficace et bien pensé, les dessins servant admirablement le propos. Mieux encore, le trait "datant" un peu rajoute aujourd'hui une ambiance finalement intemporelle (quant à la colorisation, comme nous le verrons plus loin, elle a été entièrement revue dans les dernières éditions).



Les Différentes Éditions

Watchmen a été publié à de nombreuses reprises en France, par plusieurs éditeurs et sous des formes sensiblement différentes. Faisons le tour des différentes éditions (en un seul volume, il ne sera donc pas question ici des anciens tomes publiés chez Zenda).
Delcourt, en son temps, avait sorti une intégrale, sans bonus et bénéficiant de l'excellente traduction de Jean-Patrick Manchette. Panini a ensuite ressorti, en 2009, trois versions différentes (Big Book, Cult et Absolute, à 15, 30 et 65 euros) avec des bonus pour les versions les plus onéreuses mais, surtout, une nouvelle traduction à la qualité bien moindre.

L'une des magnifiques covers des éditions Zenda.
Attardons-nous un peu sur cet aspect crucial.
Tout d'abord, il est évidemment normal qu'un texte, traduit par une autre personne, ne soit pas identique au premier. Si dix traducteurs devaient traduire la même œuvre, chacun en donnerait une version personnelle, tout simplement parce qu'il ne s'agit pas de mot à mot (sinon une machine s'en chargerait très bien) mais d'une adaptation. Cette dernière nécessite de faire des choix, de comprendre parfaitement l'univers de l'auteur, d'avoir d'indéniables qualités littéraires et de rendre le sens du propos plutôt que la forme stricte.
Il ne s'agit donc pas de ronchonner parce que l'on trouve des différences (elles sont normales) mais bien parce qu'il est tout à fait démontrable que certains choix peuvent s'avérer maladroits.
Un exemple évident : avec Manchette, "Who watches the Watchmen ?" devenait "Qui nous gardera de nos Gardiens", qui devenait, chez Panini, "Qui surveille les Gardiens ?". Non seulement l'on perd l'allitération, donc un travail sur la forme que l'on pouvait rendre très facilement, mais la pauvreté de la dernière phrase, le temps du verbe, la brièveté de l'ensemble font perdre tout le côté dramatique. Dans le premier cas, l'on a un questionnement philosophique, dans l'autre, on a l'impression que l'on demande ce qu'on va bouffer ce soir.
Une autre manière de peser, en bien ou en mal, sur une scène : lorsque, à la fin, le Dr Manhattan s'adresse à Rorschach. Manchette lui fait dire "Tu sais que je ne peux permettre cela.", ce qui devient, dans la version Panini, "Il n'en peut être question". Ici l'on perd toute l'implication personnelle, ce qui pourrait à la rigueur se justifier par la psychologie bien particulière du personnage mais ne convient finalement pas à ce moment, lourd de conséquences.
Certains changements sont plus anecdotiques mais tout aussi irritants. Dès la première page, alors qu'un inspecteur regarde le résultat, sur le bitume, d'un plongeon dans le vide, Manchette lui fait dire "méchante gerbe", ce qui conserve un ton familier et imagé mais s'avère plutôt intemporel. Chez Panini, le même type s'exclamait "vache de valdingue". L'on reconnaîtra l'espèce d'argot de voyous parisiens des années 40 qu'affectionne particulièrement Geneviève Coulomb, traductrice faisant partie du légendaire triumvirat de l'impéritie qui a officié chez l'éditeur.

Fort heureusement, Urban Comics a décidé il y a quelques années, pour son entrée sur la scène comics, de débuter sa collection DC Essentiels par une réédition de Watchmen.
Cette fois, la BD bénéficie du retour de la traduction de Manchette, plus pertinente et agréable. Et autant vous dire que, vu le volume de texte, la différence est immense à l'arrivée.
Niveau bonus, Urban a fait les choses en grand, gratifiant son lectorat de plus d'une cinquantaine de pages, et ce en maintenant le prix très abordable de 35 euros.
En vrac, l'on pourra trouver une préface de Doug Headline, les postfaces de Moore et Gibbons, des covers, des études de personnages, et, surtout, une masse d'informations et de textes, toujours entrecoupés d'illustrations, venant éclairer le travail des auteurs.
Une partie du matériel présent peut faire double-emploi avec l'ouvrage de Gibbons, Watching the Watchmen (à voir plus en détail ci-dessous), mais ce dernier étant plus orienté artbook, l'on aura la bonne surprise de retrouver dans ces bonus des pages de script, plus nombreuses, reproduites de manière plus lisibles et, surtout, traduites. Un avantage non négligeable pour les non-anglophones.
Enfin, certaines explications de Moore, très détaillées, permettent d'en apprendre un peu plus sur la vision de ce scénariste si particulier. L'on sait par exemple depuis longtemps que Rorschach est inspiré de la Question, mais Moore en livre ici une définition plus précise qui dévoile aussi bien ses opinions politiques (connues) que ses principes moraux (qui le sont beaucoup moins et le rendent pourtant bien plus sympathique). Entendre Moore dire qu'il peut avoir de l'admiration pour quelqu'un qui défend des idées impopulaires simplement parce qu'il les pense justes laisse à penser que le vieux bougon barbu n'est peut-être pas si obtus et fermé que l'on pourrait le penser en lisant certaines de ses déclarations (cf. cet article).

Outre les bonus, l'on peut également signaler une autre différence avec les éditions précédentes : la colorisation remasterisée. Vous pouvez voir ci-dessous les versions Delcourt, Panini (Big Book) et Urban. L'on constate une différence très nette entre la version Urban et les précédentes, ce qui a un réel impact sur l'atmosphère de certaines scènes, d'autant que le choix du papier, certes de qualité mais non glacé, contribue à rendre les couleurs moins criardes.
Sans aucun doute la meilleure version intégrale française disponible à ce jour.

Quelques exemples des différences apportées par la nouvelle colorisation.


Watching the Watchmen

Cet ouvrage détaille la genèse de Watchmen et contient de nombreux éléments liés à l'histoire et son développement.

Watching the Watchmen a été conçu par Dave Gibbons, artiste ayant évidemment illustré le fameux scénario d'Alan Moore. L'homme est donc plutôt bien placé pour parler de l'aventure et en dévoiler certains aspects.
L'on commence, tout logiquement, par la première rencontre entre Alan Moore et Dave Gibbons (également représentée de manière assez originale en BD) ainsi que par le parcours de l'auteur, Gibbons ayant notamment travaillé, comme la plupart de ses pairs, pour l'hebdomadaire anglais 2000 AD. Très vite l'on rentre dans le vif du sujet et Gibbons nous présente les premières ébauches, foisonnantes, concernant Watchmen. Les personnages prennent vie à partir de petits croquis esquissés sur un sofa ou un coin de table. Les résultats des séances de travail entre Alan et Dave sont reproduits ici avec un effet "papier froissé" assez troublant, comme si nous avions le privilège de pouvoir pénétrer, tout à coup, au cœur de l'étrange alchimie créative. Cela permet en tout cas de mesurer le travail nécessaire pour, à partir de traits malhabiles, aboutir au résultat final.

La plus grosse partie de l'ouvrage est constituée de reproductions de mini-maquettes, encrées, permettant au dessinateur de se faire une idée du découpage, parfois avec une comparaison entre ces versions provisoires, de tailles réduites, et la planche finale. Mais le contenu ne se limite pas à cela et le matériel s'avère plutôt varié. L'on trouve des études de groupe, des illustrations publicitaires, des notes, des échanges de courrier et même une reproduction de l'incroyable script de Moore ! Incroyable car certainement épouvantable à déchiffrer : pas de marge ni de sauts de ligne, ratures, taches, brûlures de cigarette... Gibbons doit certainement être un monstre de patience en plus d'être talentueux pour parvenir à travailler à partir d'un tel torchon.
Le lecteur peut également voir le résultat des choix du tandem, notamment l'évolution du look de certains personnages, comme Rorschach qui, à l'origine, possédait un costume entièrement tacheté, à l'image de son masque. Plus drôle, pour dépeindre les personnages, les auteurs ont accompagné les portraits de notes censées les inspirer et donner l'aspect général des protagonistes. Ainsi le Comédien est une sorte d'amalgame entre Burt Reynolds et Magnum par exemple, Ozymandias étant, lui, inspiré entre autres par... Julio Iglesias !
Certains crayonnés montrent pleinement la maîtrise de Gibbons, notamment lorsqu'un même visage est représenté à diverses époques, l'évolution des personnages étant alors pleinement perceptible bien que ceux-ci restent tout à fait identifiables.

Dans les petits plus l'on notera des comparaisons entre les planches originales et la version Absolute ayant bénéficié de procédés numériques permettant d'améliorer grandement le rendu. L'on retrouve également les magnifiques covers des premières éditions françaises ou encore quelques produits dérivés parfois franchement kitsch. Un clin d'œil sympathique : une vraie fausse cover des Watchmen façon Marvel (époque Kirby).
Parmi les anecdotes contées par Gibbons, certaines coïncidences étranges laissent songeur, comme cette photo de mars (que vous pouvez voir ci-dessous) représentant presque parfaitement le fameux smiley présent sous plusieurs formes dans tous les épisodes et reproduit presque à l'identique dans le décor martien du comic.
Enfin, le coloriste, John Higgins, n'est pas oublié puisqu'il évoque lui aussi son travail, sa minutie le poussant à s'interroger sur la différence de couleur d'un papier d'emballage de sucre, suivant que ce dernier soit éclairé par la lumière d'une cuisine ou qu'il soit exposé à l'éclairage cru et naturel de l'Antarctique ! Une preuve de plus s'il en est besoin que tout dans Watchmen a bénéficié d'une profonde réflexion et que rien n'a été laissé au hasard, l'ensemble donnant un résultat magnifique, complexe et passionnant.

Un très bon complément à la BD qui permet de prolonger le plaisir et d'en apprendre un peu plus sur le mythe.



Rorschach : L'Encre des Origines

(attention, cette partie, dédiée au personnage de Rorschach, dévoile des éléments important de l'intrigue de Watchmen)

Rorschach, pour les amateurs de comics, c'est d'abord un personnage tragique, probablement le plus emblématique (avec Osterman, alias le Dr Manhattan) de l'œuvre phare d'Alan Moore et Dave Gibbons. L'anti-héros, enfant maltraité, justicier expéditif et maître de la non-compromission, possède un charisme exceptionnel et une identité visuelle tout aussi réussie.
Bien entendu, son pseudo et son masque sont tirés du fameux test de Rorschach, rendu très populaire par le mauvais folklore véhiculé par la télévision et ses simplifications chroniques. Il faut dire que les méandres de la psychanalyse (et de ses différentes écoles) ne sont pas simples non plus à appréhender pour le profane. Or, pour comprendre Rorschach (le nôtre), il convient de comprendre Rorschach (le test).

C'est Hermann Rorschach, psychiatre suisse, qui développe le fameux test en 1921. Il s'agit d'un test dit "projectif", qui permettrait, en regard des réponses du sujet, de déceler ses principaux traits de personnalité, voire même certaines pathologies. Voilà qui est bien pratique d'une certaine façon : s'il suffit d'analyser les réactions d'un individu face à diverses taches d'encre pour le connaître en profondeur, cela permet d'économiser du temps et, évidemment, de l'argent.
D'une certaine manière, le test va surtout bénéficier, à l'époque moderne, des avancées d'autres méthodes, parfois proches en apparence. L'utilisation de dessins, dans le domaine de la psychanalyse des enfants, tend en effet à valider l'idée qu'un support graphique permet de déduire des éléments essentiels sur la personnalité d'un patient. C'est bien sûr vrai, mais il faut alors replacer l'analyse spécifique des enfants dans un contexte plus vaste : un psychologue va également prendre en compte la manière de jouer qu'a l'enfant, ou sa manière de s'exprimer, même s'il n'est pas en âge de décrire clairement des évènements traumatisants. Surtout, toute réponse, toute réaction, tout geste s'analyse par rapport à un contexte et non dans l'absolu.

L'on en vient à un point important : une analyse, chez l'adulte, est toujours essentiellement une auto-analyse. L'analyste n'est présent que pour permettre le transfert (concept majeur chez Freud) et pointer du doigt les terrains que l'on décrit et dont on évite pourtant inconsciemment les reliefs.
Dans un tel contexte, où la verbalisation, la participation active du sujet et l'échange patient/analyste sont essentiels, l'intérêt du test de Rorschach - surtout s'il est pratiqué en aveugle, un exercice bluffant qui a fait une partie de sa renommée - semble très limité.
Comment alors expliquer son succès passé et, dans une moindre mesure, actuel ?
Ce qui fonctionne bien dans le test de Rorschach, c'est en fait un "truc" simple mais peu connu du grand public : la lecture à froid (ou cold reading). En gros, le principe d'une lecture à froid réside dans le fait de convaincre un inconnu que l'on parvient à avoir accès à sa vie, son passé, ses sentiments, à l'aide d'un quelconque support (boule de cristal, tarot, test de Rorschach, thème astrologique, analyse de l'écriture, etc.).
Une lecture à froid demande un certain sens de l'observation, un peu de chance (un escroc se moque bien de ne réussir qu'une escroquerie sur trois ou quatre) et l'application de quelques techniques simples mais terriblement efficaces. Dans le lot des techniques employées, l'on peut isoler par exemple le "shotgunning", qui consiste en fait à "ratisser large" (les amateurs d'armes à feu auront sans doute compris immédiatement le rapport).

Prenons un exemple concret. Si je vous dis "vous avez souffert d'un terrible manque dans votre jeunesse parce que votre mère s'est suicidée", j'envoie une balle, unique et bien trop précise. Si, au contraire, j'affirme "vous souffrez à l'heure actuelle, peut-être d'un traumatisme lié à votre enfance ou votre passé récent", je tire à la chevrotine. Tout le monde souffre, à des degrés divers, et la personne ne retiendra de la phrase que la partie qui l'intéresse : "passé récent" ou "enfance". A partir de là et des réactions de la personne, le tir peut être de plus en plus ciblé.
Une autre technique consiste à donner à un même terme une interprétation différente. Par exemple, dans les tarots divinatoires, l'arcane "Sans Nom" (la faucheuse, la Mort quoi), n'est pas synonyme de mort mais de "changement". En gros, si vous clamsez, ben, c'est franchement un changement, mais si vous déménagez, changez de boulot, rompez avec votre petite amie, vous engueulez avec votre meilleur pote, ben... c'est un changement aussi. Mieux encore, cette carte "peut" figurer un nouveau départ, donc un truc ultra positif. Au choix donc.

Le psychologue Bertram Forer est notamment connu pour avoir décrit cet effet (appelé "effet Barnum") en démontrant la puissance, entre autres, du shotgunning et de l'interprétation multiple grâce à des tests de personnalité fictifs auxquels tous les participants se verront attribuer la même réponse sous forme de profil qui, aussi incroyable que cela puisse paraître, obtiendra la note moyenne de 4,26 (5 étant la meilleure note attribuable et signifiant que le portrait correspond tout à fait à l'idée que l'individu se fait de lui-même).
Vous allez me dire (et vous aurez raison), dans un test de Rorschach à l'aveugle, l'on ne peut pas voir la personne et tirer des informations de ses réactions. Mais, l'on a tout de même la transcription de ses réactions aux taches. Sur une ou deux, cela ne signifie peut-être rien, mais sur dix, l'on parvient forcément à tirer des informations du sujet. Son niveau de langage ou ses références permettent notamment de s'en faire, même inconsciemment, souvent une bonne idée. Le "même inconsciemment" a son importance car, en réalité, la lecture à froid peut être pratiquée de manière inconsciente, alors que le sujet "analysant" est persuadé de ses dons et de sa bonne foi, et qu'il n'a aucune envie d'arnaquer le sujet "analysé".
La lecture à froid est donc quelque chose que l'on peut pratiquer de manière malveillante, en poursuivant un but personnel, mais, malheureusement pourrait-on dire, c'est aussi quelque chose que l'on peut utiliser sans même s'en apercevoir. D'où l'extrême complexité de la chose. Des adeptes sincères de Rorschach le défendent avec l'énergie de la sincérité, ce qui a toujours nuit à la validation psychométrique du test.

Revenons-en maintenant (pour ceux qui n'ont pas décroché) à Rorschach, le personnage.
L'analyse qui en a toujours été faite, basée sur une connaissance superficielle du test, est celle d'un personnage profondément troublé, renvoyant au lecteur sa propre perception du monde, chacun étant seul devant les taches et les éventuels démons qu'elles peuvent faire surgir.
Si l'on accepte de "lire" Walter Kovacs en prenant cette fois en compte les failles du test qu'il représente (tant dans le nom que l'aspect), une lecture plus profonde et cynique encore est possible. Car, alors, Rorschach serait l'incarnation du monde se méprenant sur le monde. Une sorte de totem, à la fois impie et magnifique, représentant les océans de sang et de larmes engendrés par des interprétations et des lectures trop froides pour être vraies. Ce ne serait plus le doigt pointé vers l'analysé mais une mise en cause de l'analyste et de ses tares. En quelque sorte une personnification de la désillusion. Et effectivement, qui plus que Kovacs peut incarner le désenchantement et la douleur liée à la mystification ?

Kovacs, enfant, est d'abord confronté à l'illusion de la sécurité et au mythe de l'amour maternel, un amour censé être naturel mais dont il ne fera jamais l'objet. Après le Keene Act, la loi, censée protéger les plus faibles et s'attaquer aux criminels, semble également se retourner contre lui en lui interdisant de rendre justice et en s'attaquant aux Masques. Par la suite, un autre "masque" (dans le sens "illusion" cette fois) va tomber, lorsque Kovacs découvre qu'Ozymandias est l'instigateur des meurtres et du complot plutôt pervers visant à empêcher la troisième guerre mondiale. Toute sa vie, il est confronté à des symboles (la mère, la loi, les justiciers) qui ne remplissent pas leur rôle et s'avèrent aussi vides, réducteurs et décevants que pourrait l'être le test de Rorschach pour celui qui en découvre les limites.
Ainsi, plutôt qu'une manière de renvoyer le lecteur à ses propres interrogations, l'utilisation du test de Rorschach permettrait de symboliser les dogmes creux, les institutions faussement présentées comme immuables, la confiance aveugle dans les mots, les techniques, les comportements qui revêtent un vernis de bienveillance et d'efficacité, notamment lorsqu'ils sont issus d'une autorité respectée (l'état) ou d'un être aimé (les parents).

Est-ce là trop dire ? Dans bien des cas, il serait tentant de répondre par l'affirmative. Mais quand on a affaire à un bougre comme Moore, c'est différent. Ignorait-il, au milieu des années 80, les failles du test de Rorschach dont les plus fervents adeptes, et les déjà détracteurs, remontent aux années 40 et 50 ? Difficile de le croire, surtout lorsque l'on connaît la capacité de travail et le côté presque obsessionnel du bonhomme (il suffit de lire From Hell pour s'en convaincre). Impossible de penser qu'il ait employé une telle symbolique sans se documenter en profondeur sur ce test dans lequel il est raisonnable de supposer qu'il voyait plus qu'une esthétique ou une simple manière de titiller le lecteur. Ce serait au contraire une façon de mettre en scène l'absurdité du monde et son côté factice. Mieux (ou pire) encore, dans cette corruption involontaire de l'analyste, des croyants, de la certitude, peut-être faut-il voir non pas nos erreurs (l'erreur faisant partie de nous et nous masquant souvent confortablement la vue) mais notre condition d'êtres voués à se faire berner. Et pas uniquement par stupidité, ce qui est plus effrayant encore.

La symbolique de Rorschach est sans doute plus forte que Rorschach Père (Hermann) et Rorschach Fils (Walter Kovacs) ne le laissaient supposer de prime abord. Il ne s'agit pas tant de comprendre un esprit ou de rendre justice mais de dévoiler un leurre. Leurre basé sur rien d'autre qu'une analyse, légère mais en apparence complexe, elle-même basée sur... des taches, du flou, des sensations, uniques et personnelles, et ce fameux effet Barnum censé combler, un moment, notre profonde ignorance et nos angoisses. Angoisses renforcées par ces parents qui n'aiment pas, ces lois qui ne protègent plus, ces meurtres censés préserver la vie ou... ces tests médicaux très sérieux basés sur des trucs de foire.
Rorschach reste un nom qui aura marqué doublement l'histoire et le parcours des curieux. Et dans les deux cas, il aura été question de lecture. L'une un peu illusoire et néanmoins académique, l'autre plus agréable et subtile. Pour qui sait chercher, ce nom aura en tout cas été une précieuse balise.


Before Watchmen : réenchanter la Légende ?

En 2012, le petit monde des amateurs de comic books est secoué par un communiqué de DC Comics qui annonce la suite, ou plutôt les préquelles, de Watchmen. Alors, profanation ou bonne idée ?

Décidemment, Watchmen, en tant que référence quasi ultime du comic super-héroïque, n'en finira sans doute jamais de faire couler de l'encre et même de créer la surprise. L'œuvre culte n'avait jamais jusqu'ici connu de suite, une idée presque sacrilège pour nombre de fans et, surtout, pour le scénariste lui-même, le si jovial Alan Moore. DC mènera pourtant à bien son projet, intitulé Before Watchmen.
Moore, qui avait déjà refusé que son nom apparaisse au générique de l'adaptation cinématographique (pourtant de bonne facture), a réagi à l'annonce de Before Watchmen en déclarant, dans le New York Times : "I don't want money, what I want is for this not to happen". En gros, "je me fous bien du pognon, ce que je veux, c'est que ça ne se fasse pas".
Malheureusement pour Moore, dont on peut comprendre la réaction, les droits (et la décision) appartenaient à DC.

Voyons déjà, concrètement, de quoi il s'agit.
Before Watchmen se présente sous la forme de sept mini-séries (huit en réalité si l'on compte Crimson Corsair, un arc un peu à part, publié en back-up) :

- Rorschach (4 épisodes), par Brian Azzarello et Lee Bermejo
- Minutemen (6 épisodes), par Darwyn Cooke
- Comedian (6 épisodes), par Azzarello et J.G. Jones
- Dr Manhattan (4 épisodes), par J.M. Straczynski et Adam Hughes
- Nite Owl (4 épisodes), par Straczynski et Andy & Joe Kubert
- Ozymandias (6 épisodes), par Len Wein et Jae Lee
- Silk Spectre (4 épisodes), par Cooke et Amanda Conner

L'on pouvait à juste titre être excité par le projet, soutenus par des noms aussi prestigieux. En effet, qui n'a pas rêvé de voir de nouveau Rorschach faire équipe avec le Hibou ? Qui n'a pas eu envie d'en savoir plus sur la vie, chaotique, du Comédien ? Malheureusement, le résultat sera plus que mitigé, la plupart des récits se révélant très en-deçà de l'histoire originelle.
Nous allons nous pencher en détail sur les deux premières mini-séries, Rorschach et Minutemen, qui illustrent bien le grand écart qualitatif que l'on va constater, d'un titre à l'autre.

Minutemen
Rappelons qu'il s'agit du premier groupe de Masques, fondé à la fin des années 30, alors que l'Europe plonge dans la guerre. Il est composé de huit justiciers, à savoir le Juge Masqué, le Hibou, premier du nom, Spectre Soyeux, alias Sally Jupiter, le Comédien, dans une version plutôt jeune mais déjà violente, Byron Lewis, l'homme volant, Bill Dollar, Silhouette et Captain Metropolis.
Bien entendu, tout est loin de se passer, en coulisse, de la manière dont les médias décrivent les actes héroïques du groupe. Entre les erreurs pures et simples, les opérations lancées dans un but mercantile, les dissensions internes et les petits secrets inavouables, la véritable histoire des Minutemen s'avère explosive.
C'est d'ailleurs Hollis Mason qui nous la révèle, alors qu'il est à l'époque en train de rédiger son ouvrage, "Sous le Masque". Inutile de dire qu'il va subir des pressions de la part de ses anciens compagnons, afin de rendre la "vérité" plus supportable.

Les six chapitres regroupés dans ce comic sont écrits et dessinés par Darwyn Cooke. Son style graphique convient fort bien à l'époque décrite, avec une touche de naïveté qui contraste d'autant plus avec la dureté de certaines scènes. C'est cependant dans le traitement de l'histoire que Cooke va exceller.
Tout d'abord, l'esprit de Watchmen est clairement conservé. L'on retrouve des personnages faillibles, violents, désabusés et très éloignés d'un manichéisme rigide. L'envie de bien faire et les grands idéaux s'effritent face à une réalité cruelle qui impose subrepticement sa loi. Le groupe échappe de peu à divers scandales et se délite jusqu'à une fracassante vérité qui fait vaciller même ceux qui pensaient être restés à peu près droits dans leurs bottes. Sous les masques, les sourires se figent et se transforment en amères grimaces alors que le drame qui se joue n'épargne personne.
Tout cela se lit avec plaisir et empressement. Si certains protagonistes que l'on connaissait bien, comme le Comédien, conservent leur personnalité, d'autres, plus obscurs, acquièrent profondeur et charisme.
Du très grand art, habile et émouvant. Si la totalité de Before Watchmen avait été de ce calibre, l'opération aurait été un véritable succès. Mais comme on va le voir ci-dessous, la plupart des mini-séries se sont lamentablement plantées...

Rorschach
C'était sans doute l'un des arcs les plus attendus des préquelles de Watchmen. Il faut dire que Rorschach, par son côté jusqu'au-boutiste, sa violence mais aussi son look ou son indéniable charisme, est devenu un personnage légendaire, symbole du Héros réaliste, souffrant sous son masque et voué au pire des destins. S'il y avait donc des épisodes à ne surtout pas rater, c'étaient bien ceux-là. Et pourtant...
Le tandem qui a officié sur la série est composé de Brian Azzarello et Lee Bermejo.
Graphiquement tout d'abord, il sera difficile de trouver quelque chose à reprocher à un Bermejo qui livre ici des planches particulièrement soignées, dépeignant un New York crépusculaire de la fin des années 70. La colorisation, de Barbara Ciardo, est également très travaillée, allant par exemple jusqu'à rendre à la perfection l'effet dégoulinant de la pluie frappant une vitre.
Mais si l'aspect visuel est réussi, le scénario l'est beaucoup moins, l'on frôle même ici la catastrophe.

Azzarello choisit de mélanger deux intrigues : l'une sur un gang de dealers, l'autre sur un tueur en série qui laisse des messages sur le corps de ses victimes. Malheureusement, aucune de ces histoires ne tient la route. Et pour de nombreuses raisons.
Rorschach, tout d'abord, perd de sa superbe et semble particulièrement maladroit. Il perd, sans panache, les deux confrontations qui l'opposent au fameux gang avant d'être sauvé in extremis par l'intervention improbable d'un... tigre (une allusion tirée par les cheveux, la barbe et tout ce qu'il est possible de tirer comme poils, au poème de Blake et à "l'effroyable symétrie"). Pire, le chef du gang est d'une stupidité confondante. Après n'avoir même pas vérifié que Rorschach était bien mort la première fois, il se contente ensuite de le laisser vaguement attaché sur un lit la deuxième, en déléguant le boulot (les vilains devraient savoir que les sous-fifres s'en sortent rarement bien). Ce n'est même plus cliché, c'est risible.
Et bouquet final, le gros dur se fait buter de la manière la plus crétine qui soit (et sans l'aide de l'ami Rorschach), alors qu'il va, revêtu du masque aux célèbres taches, tabasser des gens dans la rue sans que l'on comprenne pourquoi...

C'est déjà pas mal mais ce n'est pas fini. La seconde intrigue n'a pratiquement aucune utilité, Rorschach s'en désintéressant et réglant le truc à la va-vite dans la dernière planche. Il faut encore ajouter à cela la fadeur de la pseudo love story, les énormités (Rorschach crache une flaque de sang sur une table dans un diner, mais un séjour éclair à l'hôpital le remet sur pied), les scènes aussi ennuyeuses qu'inutiles (dans le taxi par exemple), les combats au rabais et les dialogues moisis (jusqu'aux noms ridicules : Crâne Cru), et l'on aura un début d'idée de l'énorme ratage.
Le scénario est si mauvais qu'il est étonnant qu'il ait pu être validé. À croire qu'un nom connu suffit pour faire passer, aux yeux des éditeurs, de la bouse pour de la mousse au chocolat.
Du magnifique personnage bâti par Moore, il ne reste que son accoutrement, inhabité. La descente aux enfers que l'on était en droit d'attendre est remplacée par une farce maladroite dont l'indigence et l'amateurisme sont aussi criants qu'accablants.
Si c'était pour le malmener de la sorte, il aurait sans doute été préférable de laisser Rorschach reposer en paix. Lorsque l'on déterre un mythe, mieux vaut que ce soit avec panache. Si le talent excuse toutes les profanations, le manque de travail n'en permet aucune.

Bref, Before Watchmen s'avère dispensable, mais il était difficile de passer cette suite sous silence dans un dossier consacré à la série mère.
Notons que DC Comics n'en a pas terminé avec ces personnages puisque l'éditeur les fait maintenant entrer dans son univers historique, en compagnie de Batman et cie (cf. cet article).



Watchmen, le film : une excellente adaptation !

Peut-on adapter une œuvre aussi magistrale que Watchmen en film ? Moore, en vieux ronchon certain de sa supériorité, vous dirait que non. Pourtant, Zack Snyder a parfaitement relevé ce défi.
Le metteur en scène n’en était pas à son coup d’essai, il avait notamment réalisé 300, tiré de l’œuvre éponyme de Frank Miller. Le résultat était déjà plus que correct mais ne laissait pas entendre pour autant que le type pouvait s’attaquer à un mythe de la littérature et en ressortir grandi. C'est pourtant le cas.

Tout d’abord, il n'est pas certain du tout que ce film soit destiné au grand public, à l’inverse d’un vulgaire Spider-Man. C’est long (mais pas lent), c’est complexe (mais pas incompréhensible), c’est fin (mais pas élitiste), l'on sent qu'un vrai travail a été effectué.
Dans une telle transposition d'un medium à un autre, quels sont les impératifs ? Ne pas être dégueulasse au niveau visuel déjà, ce qui est le cas pour les décors et les costumes. Mettre quelques jolis effets bien modernes parce que, sinon, ça fait un peu film albanais. Et utiliser la bande son à bon escient. Et là, c’est magistralement fait…
Par exemple avec Sound of Silence, balancé pendant l’enterrement du Comédien, avec un lent travelling arrière sur le cimetière. Le tout sous la pluie, avec le World Trade Center qui se dessine discrètement à l’arrière plan (on est dans les années 80). Pour le premier ralenti, on voit le prêtre et un trou dans le sol, parmi les tombes, se découper "en dessous" du cercueil porté à ce moment-là par quelques mecs… le drapeau US recouvrant le cercueil défilant ensuite alors que la caméra commence à se détacher et à prendre de la hauteur. Wow. Il n'y a pas à dire, ça claque !

Le côté musical, c’est sympa, mais le reste ?
Ben, le reste est plutôt bien fichu également. Déjà, c’est long. Plus de 2h40. Ce qui est bien car, vu la richesse de l'histoire, il aurait été difficile de bâcler ça en moins de deux heures.
Il y a le traitement de Rorschach aussi. Juste comme il faut. Sans connerie de politiquement correct aseptisé mais sans pour autant en faire un monstre. Ce n’était pas évident car ce type ferait aisément passer le Punisher ou Moon Knight pour de gentils pacifistes, du coup, l’incarner sans tomber dans la caricature était un pari risqué. Largement gagné puisque le perso est magnifique d’intensité, d’émotion, de perdition même…
Dans un autre genre, Malin Akerman est absolument sublime en brune. Avec un regard profond et intense au charme hallucinant !
Snyder, sans faire oublier le comic, a réussi à magnifier certaines scènes et à ne trahir personne. Ni les auteurs ni les fans. Il serait dommage de se priver de la lecture du livre, mais pour une fois, si vraiment vous ne voyez que le film, vous aurez tout de même une vision relativement bonne de ce qu'est Watchmen, ce récit de légende qui a radicalement changé l'approche des super-héros.


Jouer avec les personnages de Watchmen...

Pour finir, évoquons brièvement un produit dérivé très particulier : les Heroclix.
Ces figurines permettent de simuler des affrontements tactiques entre super-héros. Les nombreux personnages de Marvel, DC Comics et d'autres éditeurs ont été déclinés sous cette forme. Et bien entendu, Watchmen a également eu droit à son set. Il est donc possible d'être à la tête de Rorschach, du Comédien, du Dr Manhattan ou d'Ozymandias et de les mener au combat !
Ou simplement, de collectionner les personnages afin qu'ils trônent fièrement dans les rayonnages de votre bibliothèque, à côté d'un certain comic devenu... mythique.




[1] Notons que les personnages de Watchmen sont si emblématiques du genre super-héroïque qu'on les retrouve aussi dans certaines parodies, notamment The Gutter, de Cyril Durr et Sergio Yolfa, qui met en scène un Rorschach apprenant qu'il sort de sa retraite à l'occasion de Before Watchmen (la préquelle évoquée ci-dessus) ou encore un Dr Manhattan insensible à une séance de drague entreprise par la jolie Emma Frost.