the X-Files : en comics chez Glénat
Par

En plein dans le revival X-Files, Glénat propose aux amateurs de bande dessinée de plonger dans l'univers désormais familier de la série par le biais d'albums au design soigné, étoffés (du moins pour le tome premier, nous verrons si c'est toujours le cas ensuite) de petits suppléments éditoriaux aussi utiles que pertinents.

On pourrait a priori penser qu'on est face à une entreprise plutôt opportuniste, ne cherchant qu'à surfer sur la vague du succès - la dernière saison ayant fait le buzz, réveillé les ardeurs des anciens aficionados et attiré de jeunes loups assoiffés de vérités qui dérangent. Le neuvième art a souvent été le support privilégié pour les fans frustrés de ne pouvoir prolonger l'expérience de la projection de leur film ou série préférée. Rappelez-vous (je parle bien entendu aux plus vieux d'entre vous, ceux qui ont tenu au moins une fois entre les mains des exemplaires de Strange édités chez Lug) des épisodes de Star Wars comblant les trous (et les attentes) avec parfois quelques grands artistes aux pinceaux (je crois me souvenir que Carmine Infantino en a illustré quelques-uns). La qualité de ces numéros de papier n'était pas toujours au rendez-vous, ayant la même vocation que les one-shots, mais on y dénichait quelques perles. X-Files a d'ailleurs eu, ici en France, les honneurs d'une adaptation en BD dont de nombreux épisodes ont été publiés dans des fanzines, et notamment le X-Files Mag de 1996 : il s'agissait d'un comic-book officiel publié outre-Atlantique chez Topps et dont les premiers auteurs étaient Stefan Petrucha & Charles Adlard. A la même époque, le geek ultime pouvait également se procurer une version manga - qui s'éloignait toutefois un peu plus des canons imposés par le père de la saga, Chris Carter.

Or, ce dernier, en tant que producteur exécutif, a validé la série que Glénat publie, laissant à Joe Harris & Michael Walsh à peu près la même liberté que la majorité des intervenants sur la série TV, c'est à dire davantage que George Lucas sur Star Wars mais moins que David Lynch sur Twin Peaks. Mieux même - en tout cas pour le véritable amateur des aventures de Mulder & Scully - le premier album est en fait un arc intitulé "Ceux qui croient" et qui s'inscrit presque directement après le dernier épisode de la saison 9, reprenant quelques éléments du second film, X-Files Régénération, tout en lorgnant vers la saison 10. Par conséquent, les points forts de cette nouvelle saga papier devraient conforter les fans purs et durs, même ceux qui regrettaient la disparition un peu cavalière de Doggett et Reyes : car the X-Files #1 est avant tout un (gros) épisode lié à la mythologie (donc à l'histoire de Mulder depuis l'enlèvement de sa sœur, aux multiples complots touchant des branches plus ou moins secrètes du gouvernement et aux projets d'invasion/colonisation extraterrestre). Et en tant que tel, par le truchement de petits chapitres très denses (mais aux ellipses un peu erratiques), on nous propose de passer en revue quasiment tous les éléments essentiels de l'univers de la série : outre le déroulement sur le mode du thriller de l'intrigue principale (axée sur... le fils de Dana et Fox, qui avait été confié à l'adoption dans une famille lambda afin qu'il soit mis hors de portée des forces cherchant à garder la mainmise sur la planète), on assistera avec un mélange de stupeur et de plaisir nostalgique à la réapparition de protagonistes qui avaient fait le sel de nombreuses saisons. On sent bien dans ce projet la volonté de mettre beaucoup (trop ?) d'œufs dans le même panier, comme pour tenter d'authentifier au maximum l'initiative.


Le résultat est plutôt plaisant. Mais surtout à la lecture, car je dois avouer que les dessins sont d'une rare laideur, et notamment du côté des visages : Michal Walsh a cherché à demeurer le plus proche possible des traits de nos héros, mais son coup de crayon manque cruellement de finesse. Ne parlons pas des décors qui sont minimalistes, des scènes d'action parfois ridicules, reposant sur des artifices d'un autre âge et d'une mise en page sans âme. Cependant, l'histoire tient la route et parvient à fasciner par sa propension à se rapprocher des standards télévisuels. On a notamment l'excellente surprise de retrouver cette forme d'humour particulière initiée par le créateur Chris Carter (qui avait atteint des sommets frôlant l'auto-parodie dans la saison 7) mais qui s'était un peu perdue depuis et qui semblait sonner faux dans la dixième saison.
Pour 10€ (il s'agit d'une offre "découverte"), on tient un bon épisode construit à l'ancienne, avec la qualité et les défauts propres à la mythologie carterienne (des révélations qui mènent à d'autres questions), plutôt rythmé et proposant rebondissements et péripéties à foison. C'est ce que j'appelle un bon début.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Le plaisir de retrouver les personnages emblématiques de la série, même ceux qu'on croyait disparus.
  • L'impression persistante d'être dans un épisode de la série, construit suivant les mêmes canons.
  • Une intrigue dense et prenante, articulée sur certains des points forts des X-Files.
  • Un dosage habile de l'humour particulier aux X-Files.
  • De belles couvertures.
  • Un travail éditorial conséquent avec une préface et un dossier intéressants.
  • On en a pour son argent (prix de lancement : 10€).

  • Le côté graphique très mal exploité.
  • Une mise en page sans originalité.
  • Des dessins assez laids avec des visages parfois grotesques.
  • Quelques efforts à faire du côté de la relecture avec une ou deux coquilles.