Top 5 des musiques de BO qui ont mieux vieilli que leurs films
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Il y a quelque temps, nous vous avions proposé un top 5 musical qui était, il est vrai, très orienté metal (cf. cet article). Nous allons cette fois nous attaquer à un domaine très différent : les musiques de films. Mais pas n’importe lesquelles, plutôt les titres franchement sympa qui accompagnent des films qui ne sont tout de même pas des chefs-d’œuvre.

Alors, j’ai volontairement mis de côté les films français, parce que des nanars qui disposent de bonnes musiques en comparaison de leur scénario naze, il y en a bien trop par chez nous. Hop, hors concours. C’est dommage parce que j’aurais bien aimé évoquer le Destinée de Guy Marchand. Bon, le titre est à appréciation variable (la mélodie rentre bien dans le crâne quand même) mais il est toujours infiniment mieux que le film dont il est issu (Les sous-doués en vacances).
On se concentre donc sur le cinéma étranger. Ben… américain donc.
On commence léger mais vous allez voir qu’on va finir avec du très lourd.

5. Top Gun – Righteous Brothers : Lost that loving feeling

Si vous n’étiez pas ado dans les années 80, il y a peu de chances pour que Top Gun vous ait frappé. Pourtant, à l’époque, c’était carrément une réussite au niveau de la forme. Même le pourtant très critique et acide Hebdogiciel lui avait octroyé la note de 14/20 (à la différence de Télérama, ces gens avaient plus de goût que de principes élitistes).
Il faut bien le reconnaître, si on le visionne aujourd’hui, Top Gun a aussi mal vieilli qu’une actrice hollywoodienne sous botox. Ça se fissure de partout. Tom Cruise en fait des caisses, les situations sont caricaturales au possible, la vraisemblance inexistante… mais bon, dans les années 80, ça respectait les codes narratifs en vogue, c’était même « moderne ».
La BO est plutôt sympa dans son ensemble, mais en réalité, celle qui a été mise en vente ne contenait pas la chanson dont il est question ici. Pourtant, elle revient à deux reprises dans le film. Une première fois dans une horrible traduction française quand Tom Cruise drague Kelly McGillis dans un bar, une seconde fois à la fin du film, grâce à un bon vieux juke-box.
C’est un titre des années 60 et pourtant, il est encore très bon, au contraire du film, bien plus récent, qui ne peut plus se voir qu’avec un deuxième degré évident tant il parait daté et maladroit.

La musique en question : click


4. Cobra – Jean Beauvoir : Feel the Heat

Toujours les années 80 avec évidemment un bon vieux Stallone. Qu’est-ce que les franchouillards prétentieux ont pu lui chier dessus à l’époque… bon, faut dire qu’il n’a pas fait que des films dignes d’intérêt. Tout comme Over the Top, une énorme « fausse » bonne idée qui consistait à filmer des bras de fer, Cobra est un très mauvais film doté d’une très bonne BO.
J’ai retenu ici Feel the Heat mais Angel of the City ou Loving on Borrowed Time auraient pu aisément tenir le même rôle emblématique.
La musique est à l’image du personnage, carrée, propre, efficace, un poil violente mais gentille quand même.
Le film, lui, est un pur naufrage. Le personnage incarné par Stallone porte pourtant en lui toutes les graines du « mec cool » des années 80 : infaillible, costaud, en marge du système, possédant quelques failles (dans le cas présent son… prénom). Plus tard, des gens comme Mel Gibson ou Bruce Willis incarneront le même type de héros, avec des couilles énormes et toujours une petite vanne à balancer avant de flinguer les méchants. Il faut néanmoins reconnaître que Stallone, et Cobra, sont pour beaucoup dans ce stéréotype qui durera jusqu’au début des années 90.

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3. Le Diamant du Nil – Billy Ocean : When the going gets tough, the tough get going

Ah, voilà un incontestable bon nanar, bien naze. La suite de A la poursuite du diamant vert (Romancing the stone) ! Typiquement de l’aventure des années 80, avec le héros soi-disant « bourru » (mais en réalité très propre sur lui) et la nana dépassée qui le prend en grippe mais finira par tomber amoureuse du gaillard. On connait la fin après trois minutes de film.
Inventivité zéro, mais dans le second opus, bien pire, il y a tout de même Billy Ocean. Ben Billy Ocean quand même, celui de Caribbean Queen ou Loverboy !
Mais en réalité, c’est le clip de When the going gets tough, the tough get going qui a une histoire savoureuse. En fait, pour cette chanson, emblématique du film donc, les acteurs principaux ont tourné dans le clip. Et le clip était assez basique, c’était en fait une sorte de concert filmé. On voit le grand Billy, ces musiciens, et trois « faux » choristes tout de blanc vêtus : Michael Douglas, Kathleen Turner et Danny DeVito. Et là, scandale, certains syndicats ont gueulé à l’époque parce que DeVito faisait… semblant de jouer du saxo. Parait que ça lésait le vrai saxophoniste.
Ah oui, déjà à l’époque, ça gueulait pour pas grand-chose. Parce que bon… quelqu’un a cru que DeVito jouait vraiment ? Parce que si c’est le cas, attention, j’arrive avec une deuxième nouvelle qui risque de vous mettre sur le cul : Douglas et Turner ne chantent pas vraiment non plus.
J’admets que le titre n’est pas le meilleur Ocean que l’on puisse se mettre dans les tympans, mais ça reste tout à fait sympathique. Et bien meilleur que le film.

La musique en question : click (et la seconde version politiquement correcte, avec le vrai musicos : click)


2. Eyes Wide Shut – Jocelyn Pook : Masked Ball

Un film bien plus récent, et un Kubrick quand même, pour une musique exceptionnelle et très marquante.
Le film, avouons-le, n’est pas au niveau d’un Full Metal Jacket par exemple ou d’un 2001, A Space Odyssey. Il faut préciser que Kubrick est décédé avant que le film soit terminé, et que les mecs prétendant connaître son avis ne s’accordent pas vraiment sur ce qu’il était supposé en penser. Certains estiment qu’il imaginait que c’était « sa plus grande contribution au cinéma » (c’est l’avis d’un des producteurs du film), d’autres rapportent qu’il pensait que c’était « de la merde ». Grand écart facial dans ta gueule.
Quand on voit le film, on se dit que le deuxième avis est tout de même plus proche de la vérité. C’est lent, prétentieux, faussement sulfureux et au final terriblement décevant.
Mais Masked Ball restera sans doute dans les mémoires de ceux qui ont vu le long métrage. Le chant que l'on entend a d’ailleurs une origine intéressante : il s’agit d’un chant liturgique orthodoxe roumain joué en sens inverse. L’effet est saisissant. Très étrange et même inquiétant. La musique a elle seule donne un « poids » énorme aux scènes qu’elle accompagne. L’effet voulu (Kubrick voulait du « weird ») est parfaitement obtenu, c'est carrément flippant.

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1. The Mist – Dead Can Dance : Host of Seraphim

Je termine musicalement sur le morceau le plus lourd en termes de qualité mais aussi d’impact émotionnel.
The Mist est l’adaptation de la nouvelle (plutôt une novella en terme de longueur) Brume, de Stephen King. C’est très mal foutu. On sent le manque de moyens et le manque de savoir-faire (un strike normalement catastrophique).
Et pourtant, ce truc (bien en-deçà du récit de King) est sauvé par la bande son et une ou deux scènes énormes en fin de film. C’est typiquement la bonne alliance. Quelque chose qui illustre parfaitement la désespérance et le côté… démesuré du destin, de la vie, de l’univers.
Impossible d’entendre les premières notes de ce morceau sans avoir des frissons. Sans avoir une modification nette de l’humeur. Sans avoir des failles subites dans vos pensées, qui vous emmènent loin, bien loin de vos préoccupations quotidiennes.
Ce n’est pas forcément le truc à manier n’importe comment par contre. Ce n’est pas le genre de chose que l’on écoute en bagnole, en partant en vacances avec ses gosses.
Ce n’est pas non plus le genre de truc que l’on devrait écouter le soir, tard, avec du whisky dans les veines et un flingue chargé dans le tiroir du bureau.
Parce que ça a un impact. Et que ça remue des choses, de la vase, que l’on ne devrait côtoyer qu’au grand jour. Et de bonne humeur.
Mais quelle puissance ceci dit. Quelle beauté aussi. Une beauté étrange, douloureuse mais fascinante. Le son a ceci de pratique qu’il est universel. Peu importe que vous soyez suédois, chinois, allemand ou péruvien. Si vous entendez ce truc, vous savez que l’on ne célèbre pas l’arrivée de l’été ou que ce n’est pas l’accompagnement d’une fête de la saucisse. Ça ne raconte pas non plus les tourments d’un trou du cul qui a perdu ses clés. On sent que c’est important. Que cela touche à notre condition. Cela fait vibrer en nous les cordes éternelles qui sont présentes chez tous les humains. Avec un drôle d’accord tragique.

La musique en question : click


Hmm, c’est pas joyeux pour la fin, mais j’avais prévenu.
La musique est importante. Dans les séries, les films, c’est elle qui donne la sensation première, la tonalité générale. Une scène un peu pauvre peut être rattrapée par une musique dramatique. Et la même scène peut être mise en perspective, avec un second degré évident, par l’utilisation d’une musique différente. Et sans musique, l’effet est garanti : on rallonge la longueur apparente d’une scène.

Le son, paradoxalement, est primordial dans ce que l’on regarde. Il donne un sens et habille l’image. Et parfois, les fringues tiennent plus longtemps que les bonhommes...